[LES MATINALES DU CPC] "L'économie de partage saisie par le droit des contrats"
Evènement | 27 avril 2023
Présentation des travaux de thèse de Chloé LEDUQUE, Docteur en Droit privé, Centre Patrimoine et Contrats, Equipe Louis Josserand, Université Jean Moulin Lyon 3
Conférence 27/04
Les modes de consommation « alternatifs » sont, depuis quelques années déjà, au centre de toutes les attentions. Si les réflexions se concentrent généralement sur les pratiques « collaboratives » à l'instar d'Airbnb ou d'Uber, l’on ne saurait négliger ce qu’il convient de ranger sous l’étiquette d’« économie de partage » (systèmes d’échange locaux, couchsurfing, etc.). Ces pratiques s’accommodent assez mal des clefs de lecture traditionnelles. Elles semblent, en effet, questionner la structure même du droit positif des contrats, puisqu'au sein des communautés de partage, celui qui s’oblige à l’égard d’autrui obtient le droit de réclamer, par la suite, une prestation à n’importe quel membre du groupe dont le compte est débiteur. Or, comment expliquer un tel mécanisme lorsque chaque prestation est conclue dans un rapport interindividuel entre deux membres seulement de la communauté ? Celui qui s’exécute au profit d’un autre dispose-t-il du droit d’engager l’ensemble du groupe par le biais d’un mécanisme de représentation ? La communauté est-elle¸in fine, partie au rapport contractuel ?
Prenant le parti, non pas de dégager un régime juridique spécifique à cette économie, mais d’étudier de manière empirique l’impact de celle-ci sur le droit positif, ce travail ambitionne de démontrer l’incapacité du droit des contrats à prendre en compte l’ensemble de la réalité contractuelle contemporaine en prenant, pour ce faire, l’exemple de l’économie de partage. Pour comprendre avec justesse les substilités juridiques induites par ces pratiques, il a fallu saisir la nature précise des contrats individuels qui forment le maillage de relations contractuelles. Dans un premier temps, l’étude menée a mis en évidence la nécessité d'affiner certaines des catégories contractuelles du droit des contrats. La distinction entre la gratuité et l'onérosité, ainsi que celle opposant les contrats synallagmatiques aux contrats unilatéraux, ont ainsi dû être questionnées. Dans un second temps, il est apparu nécessaire d'étudier l'impact du fonctionnement des communautés sur les relations interindividuelles de partage et d'élargir le prisme pour focaliser l’attention moins sur le contrat que sur la relation contractuelle elle-même, tout en s'intéressant aux conséquences de cet élargissement sur la qualité des différents intervenants.